Chaque culture ou religion possède des rites et fêtes commémoratives qui lui sont propres, mais il est une célébration qui est honorée partout à travers le monde, qu’elle soit appelée fête des vaches au Népal, fête des fantômes en Chine ou Commémoration des fidèles défunts en France : la fête des morts. Au Cambodge, l’équivalent bouddhiste de cette fête, d’origine antique et auparavant fêtée pendant 3 mois dans les communautés khmères, ne se commémore plus maintenant que pendant 2 semaines. Le quinzième et dernier jour, nommé Pchum Ben, s’avère primordial.
En effet, ce jour de lune décroissante, qui est également le plus sombre, est le seul qui puisse permettre aux « priad », ces âmes considérées comme les plus misérables, de recevoir de leur famille et de leurs proches des offrandes, qu’elles soient prières ou nourriture. Contrairement aux autres âmes dont le Karma s’avère moins insignifiant, et qui peuvent retrouver leurs amis et parents pendant toute la durée des festivités. Pchum Ben a d’ailleurs une importance capitale dans la vie des Cambodgiens, car cette fête leur permet de se réunir en famille, et d’exprimer leur affection pour leurs défunts ancêtres. Mais c’est aussi une occasion pour les vivants d’essayer d’améliorer le mauvais Karma des morts dont l’âme reste prisonnière du monde des esprits, en raison d’actes perpétrés pendant leur vie terrestre, et jugés malsains (d’où l’impossibilité pour eux de se réincarner, ou de « renaître », mais aussi de rejoindre le suprême Brahmâ).
C’est à Yâma, divinité des Enfers, que les vivants doivent d’ailleurs ces retrouvailles éphémères : dans sa grande clémence, ce dieu a décidé de libérer temporairement les âmes errantes tourmentées afin qu’elles puissent retrouver leurs parents vivants, mais aussi se repentir et méditer avec eux. Des offrandes alimentaires sont ainsi déposées dans les pagodes (des temples bouddhistes), afin d’apaiser leur misère et les aider à retrouver le chemin de la réincarnation. Mais si par malheur la famille n’offre pas à manger, et que l’âme du défunt ne trouve nulle offrande après avoir cherché dans 7 pagodes, alors la parenté sera damnée et harcelée toute l’année. Car ces dons ne sont pas uniquement destinés à atténuer la souffrance des morts : ils sont également l’occasion d’apporter aux moines un soutien matériel, en échange de prières et de méditation en l’honneur du défunt.
Afin de célébrer dignement cette fête religieuse particulièrement populaire, les Cambodgiens bénéficient d’ailleurs de 3 jours fériés, afin qu’ils puissent revenir dans leur village natal et se rendre à la pagode pour déposer leurs offrandes. Mais comme dans la plupart des cultures, la fête des morts cambodgienne est avant tout l’occasion de se remémorer les proches décédés, puisqu’un banquet est généralement offert aux amis de la famille, la nuit précédant Pchum Ben. Certains quartiers en profitent également pour apporter leur obole au génie protecteur des sols, et ainsi s’assurer de moissons prospères le reste de l’an, car cette fête coïncide aussi avec la fin de la mousson d’été (la « retraite des pluies »). Célébrée du 14 au 16 octobre cette année, la commémoration aura lieu du 26 au 28 septembre l’année prochaine.